Dans le cadre de la seconde partie du projet de loi de finances 2019, je suis intervenu sur l’avenir de la politique de la ville.


 
« M. Le Président, le Ministre, Mes chers collègues,
Avec ce gouvernement, je dois dire que lorsqu’il s’agit de politique de la ville, nous ne savons pas sur quel pied danser.
Après une année 2017, marquée par des discours ambitieux d’émancipation du président de la République à Clichy-sous-Bois et Tourcoing ; des discours qui répondaient à la fronde massive des associations et des maires de tous les camps, traduit dans l’appel de Grigny, sans réelles concrétisations budgétaires ;
Après un premier semestre 2018, qui a vu l’ensemble des élus locaux de la politique de la ville échaudés par le discours du Président du 22 mai dernier suite à la présentation, ou plutôt à « l’enterrement élyséen », du rapport Borloo ;
Vous semblez redresser la barre avec une feuille de route un peu plus volontaire et des engagements financiers laissant entendre que parfois vous pouvez écouter l’opposition, que vous pouvez écouter ces Français qui souffrent.
Ne vous arrêtez pas en chemin, car plus il y aura d’écoute, moins il y aura de gilets.
La politique d’émancipation en faveur des habitants des quartiers nécessite des moyens.
L’émancipation passe par l’éducation, bien sûr, mais aussi par l’emploi. Dans nos quartiers prioritaires, le taux de chômage, je le rappelle, est à 27%.
En même temps que vous persévérez diaboliquement sur le chemin de la suppression d’un très grand nombre de contrats aidés, le dispositif expérimental des emplois francs « nouvelle mouture » est en deçà des objectifs fixés. Au 1erseptembre 2018, moins de 2.000 emplois francs ont été conclus quand 25.000 étaient attendus cette année.
Remobiliser les préfets et s’appuyer d’avantages sur les missions locales est important mais n’est pas suffisant.
Dans ce domaine, nous croyons en « l’efficacité d’échelle ». Pourquoi donc ne pas étendre la liste des territoires éligibles à l’expérimentation au-delà des 7 territoires actuels ?
Concernant la rénovation urbaine, des inquiétudes demeurent.
Car si l’État semble confirmer son engagement pris au courant de l’année, nous nous retrouvons avec un financement du NPNRU de 185 millions d’euros en autorisation de paiement et seulement 25 millions d’euros de crédit de paiement.
Nous comprenons l’argument qui consiste à expliquer que les projets de rénovation ne sont pas encore ficelés.
Mais nous avons perdu 18 mois.
18 mois, quand on connait l’état d’insalubrité de nombreux logements, l’impact direct sur l’état de santé des habitants – l’espérance de vie y est plus faible – nous ne pouvons collectivement l’accepter.
 
La création de la nouvelle Agence nationale de la cohésion des territoires, qui impacte directement
l’EPARECA, le CGET mais également le CEREMA, l’ANRU et l’ANAH, peut aussi être un facteur retardateur de la mise en place du NPNRU.
Un des principaux acteurs de la politique de la ville, ce sont les territoires, et plus particulièrement les communes. Et permettez-moi de le souligner mais, de ce côté-là le compte n’y est pas.
Arrêtons-nous un instant sur la dotation de la politique de la ville, la DPV. Vous annoncez l’avoir sanctuarisé à hauteur de 150 millions d’euros pour 2019, mais vous élargissez le champ d’attribution de cette dotation.
Cela veut dire que l’enveloppe globale reste identique mais que le nombre de villes concernés augmente. Ces villes toucheront donc en moyenne moins que l’année précédente.
Regardons maintenant la dotation de solidarité urbaine. Si la péréquation horizontale n’augmente pas, la péréquation verticale augmente moins que toutes les autres années. 20 millions d’euros en moins par rapport au budget 2018.
Chaque année, ces communes les plus pauvres de notre pays perdent des recettes si l’on tient notamment compte des abattements et exonérations de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Vous le savez M. le Ministre, qu’elles soient rurales ou urbaines, ces dotations constituent pour elles la seule recette dynamique de leur budget. Cela ne peut plus continuer ainsi.
Il y a urgence sociale dans tous nos quartiers prioritaires, qu’ils soient urbains ou ruraux. Face à l’ampleur des inégalités vécues par ces 5 millions de Françaises et de Français, la réponse républicaine doit être global : sur l’éducation, l’emploi, le logement, le cadre de vie.
Il en va de la survie de notre cohésion nationale.
Car forcément funeste sera le destin d’un pays qui voit sa population partagée en deux nations : la nation des privilégiés, pour qui le champ des possibles est grand ouvert, et celle de ceux pour qui l’égalité des chances n’est qu’une chimère. »
 
 
 
 
 

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